Les Films de la Semaine à Toulouse
LE CHANT D’UNE ÎLE
Durée: 01:43:00
Date de sortie: 0000-00-00
Réalisé par: Joaquim PINTO et Nuno LEONEL
Acteurs:
Producteur:
Scénariste:
Pays: Portugal
Genres: documentaire
Année de production: 0000
Distributeur:
Synopsis: C\'est beau Le Chant d\'une île… N\'empêche ! On avait un petit faible pour le titre original : Rabo de Peixe… De quoi se gratter la tête quand on ne parle pas portugais et imaginer plein de traductions exotiques avant de découvrir que c\'est tout simplement le nom du petit village où tout se déroule. « Rabo de Peixe » veut dire littéralement « Queue de poisson » ! Ne riez pas ! Entre Longcochon et Bouc Étourdi, certaines communes françaises ne sont pas mieux servies ! Et puis cette queue de poisson colle parfaitement à la peau de cette bourgade de pêche et à celle de ses habitants. On en vient même à se dire ironiquement que ce nom était prédestiné et pourrait même qualifier les politiques européennes et internationales en matière de pêche et d\'écologie : des stratégies insaisissables, qui font des pieds de nez aux humbles travailleurs, virent de bord quand ces derniers pensent enfin tenir le bon bout et finissent invariablement par leur glisser entre les doigts ! Mais là, on extrapole un peu…
Ce très beau film est d\'abord le fruit d\'une rencontre insolite, au creux des Açores, entre des insulaires imprégnés de traditions séculaires et une équipe de tournage venue d\'un monde reformaté par des technologies modernes. Ici à Rabo de Peixe, nul besoin de réseaux sociaux pour se sentir exister, ni de grandes phrases pour ressentir pleinement ce qu\'est la solidarité. Traditionnellement on partage ce qu\'on a, on affronte ensemble les tempêtes, et on reste soudés dans la fête autant qu\'on le sera pour faire face aux caprices de la nature. On peut le dire, même si ce n\'est jamais évoqué explicitement : quand les deux réalisateurs débarquent là, c\'est d\'abord pour des raisons personnelles. Porteurs du VIH, ils viennent dans ce coin reculé à la recherche d\'un havre de tranquillité, pour se requinquer. Ce lieu de retraite va devenir pour eux un fascinant sujet d\'observation et donner lieu à un premier reportage pour la télé sur les techniques de pêche artisanales en voie de disparition. Obligés de passer sous les fourches caudines du petit écran, ce premier travail achevé les laisse sur leur faim et traîne dans son sillage un sentiment de frustration.
Dix ans passent… et les voilà qui reprennent l\'ouvrage pour l\'amener, en toute liberté cette fois, à un aboutissement plus authentique. Le ton est tout autre, sans clichés, et jamais il ne sombre dans le mythe de l\'objectivité pour nous asséner un point de vue. Joaquim Pinto et Nuno Leonel ne se contentent pas de survoler un sujet, ils plongent dans la réalité d\'une humanité qui se bat pour sa survie. En fait, toutes ces années, ils n\'ont jamais vraiment réussi à se détacher de Rabo de Peixe et se sont enracinés ici, comme ensorcelés par ces îles et les chants silencieux de leurs sirènes invisibles. Et c\'est à notre tour d\'être fascinés par le courage, la soif de liberté de ces marins : de grands mots faciles à dire mais qu\'ils mettent en œuvre au quotidien pour affronter l\'indifférence d\'un océan indomptable.
Façonnés dans leur lutte quotidienne, les voilà qui se tiennent fiers et robustes, forgés dans une matière aussi dure que les paysages volcaniques qui les entourent. Ils attirent le respect, l\'empathie et on comprend comment de simples sujets ils sont devenus de véritables compagnons de route pour les réalisateurs. Cette proximité se ressent dans chaque plan, authentique, vivifiante comme ces amitiés maritimes. Elle nous questionne sur les routes qu\'empruntent nos civilisations, nous ramènent à l\'essentiel : la beauté d\'un paysage, la valeur de la vie, la lutte indispensable pour la préservation de notre planète. Ces simples pêcheurs sont de vrais résistants, qui s\'opposent à la pêche industrielle qui les appauvrit à force de draguer et de détruire aveuglément les fonds marins. Rabo de Peixe, c\'est mieux qu\'un film, c\'est une leçon d\'humanité. Et de beauté.